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Yves Hoffmann
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PERPIGNAN, LA FÊTE AUX PLATANES

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 C’était hier, c’était il y a mille ans, les grands platanes disparus sous d’aveugles cognées ont perdu leur harpe de feuillage avec les vents venus des quatre horizons et les oiseaux du printemps.
Les clowns bavards et bariolés sont allés voir ailleurs s’ils y étaient encore. Élodie, la femme à barbe, a rasé ses poils incongrus, les lutteurs ont cessé de faire rouler leurs muscles démodés et les grands chevaux blancs de mon enfance sont allés cavalcader sous d’autres cieux.
La Victoire meurtrie du monument de 1870 s’est vue confier la mission obsolète de régler la circulation automobile du carrefour Jean-Bourrat.
Faute de spectateurs, les paons sont partis jouer de l’arc-en-ciel de leurs roues dans d’autres paysages et les cygnes blancs et noirs les ont suivis, eux qui dansaient si joliment de toutes leurs ailes un ballet sans musique sur les eaux mortes des bassins disparus.
Les lampions se sont éteints, les limonaires se sont tus et les platanes ont cessé de faire la fête.


C’était hier, c’était il y a mille ans.

 

Yves HOFFMANN
In : Perpignan, une et plurielle (Canet, Éd. du Trabucaire, 2004)

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Yves Hoffmann

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